Notre position :
L'équipage est de retour en France
Mateo est resté à Nouméa
    
Dernière mise à jour : 13/06/2010

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Récits de voyage

4ème partie : Des Iles San-Blas (Rep. panama) aux Galapagos

 



- Les Iles San-Blas
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  Les Galapagos

(11 août - 21 août 2005)

 

 


Sur le pont pour l'arrivée

 

 

 

 


le mouillage à Isabela

Galápagos, un nom qui fait rêver, qui nous fait penser aux origines de la vie, depuis que Darwin y a fait escale et y a élaboré sa théorie de l'évolution. Ces îles volcaniques, sont en effet restées vierges jusqu'en 1535 et elles avaient gardées leur aspect originel. Jusqu'à la venue de Darwin en 1835, elles ne serviront que de refuges à des pirates et autres chasseurs de baleines sans être vraiment colonisées comme tant d'autres endroits.
Annexées par le gouvernement équatorien en 1832, elles deviendront Parc National en 1959.
Entre temps, l'Equateur n'ayant pas les moyens de s'en occuper, elle seront colonisées par des aventuriers, allemands, irlandais, qui viendront essayer d'y retrouver un paradis.

La traversée depuis Manta est très calme: on est au petit largue, la mer est peu agitée et il y a toujours du vent. En plus un courant portant de plus d'un nœud nous pousse gentiment. Mais le ciel restera gris, juste une petite éclaircie de temps à autre.
Au matin du cinquième jour, on arrive en vue de San Cristobal, la première île des Galápagos. On n'a pas prévu de s'y arrêter, car les copains qui y sont allés nous ont prévenus que les formalités ici coûtaient cher: plus de 100$ et même plus de 200$ pour des bateaux plus grands!
Quant à Santa Cruz, l'île principale, elle est envahie de touristes et la seule véritable chose à voir est la station Darwin et son élevage de tortues.
On pense donc s'arrêter à Floreana ou Isabela, 2 îles moins visitées par les touristes. Mais entre les îles le vent tombe, et nous arriverons trop tard pour aller à Floreana avant la tombée du jour. On décide donc de passer une nuit supplémentaire en mer et d'aller directement à Isabela, l'île la plus à l'ouest.
Entre les îles, les courants sont importants et on traverse parfois des zones de remous. Nous voyons aussi beaucoup d'oiseaux, qui viennent faire les curieux autour de nous.
On ralenti pour arriver au lever du jour à Puerto Villamil, le seul village de Isabela, au sud de l'ile: l'endroit est pleins de rochers, et il faut trouver l'entrée entre les brisants. Mais avec la navigation électronique ce n'est pas trop dur, et surprise, l'entrée est même balisée par des bouées, lumineuses de surcroît.
Juste avant l'entrée du port, une otarie vient à notre rencontre, elle nage quelque temps dans le sillage de Mateo: le comité d'accueil est bien réussi ici!
On aperçoit quelques mats, et on se dirige vers la zone de mouillage: il n'y a pas beaucoup de profondeur et des roches affleurent par endroits, mais celle-ci est très tranquille, et le soleil apparaît, éclairant l'eau turquoise et les récifs de pierre noire qui la protège : c'est superbe.
Un canadien, un allemand, un américain et un autre français, "Florix", nous ne sommes que 5 bateaux ici.



Une otarie, dessinée par Florian

 

 


Des centaines d'oiseaux sur la plage

 

 

 

 

 


Le village de Puerto-Villamil

Nous débarquons pour faire les formalités: on sort le moteur d'annexe, car il faut aller au quai des pêcheurs en contournant les récifs ce qui fait un bout. En route on aperçoit otaries, tortues, fous, pélicans et parfois petits pingouins. Tout ce petit monde n'est pas effrayé et on peut les approcher de près, surtout les otaries qui sont très cabotines et font des pirouettes quand on les applaudit!
Le Capitaine du Port nous informe que nous avons droit à 10 jours d'escale, nous lui disons que nous pensons rester 5 jours: il faut payer 35 dollars de formalités plus une taxe journalière d'environ 1,5$. En fait nous resterons 10 jours sans qu'on ne nous demande rien, certains bateaux sont même restés plus longtemps sans faire aucune formalité. C'est plutôt cool ici.
Le petit village est tranquille, avec ses rues couvertes de sable, ses nombreuses petites boutiques et restaurants. Très peu de touristes, de temps en temps un bateau débarque ses groupes pour une visite guidée mais tout le monde repart le soir.

On fait une grande promenade sur la plage, ou il y a des centaines d'oiseaux de toutes sortes, et des iguanes sur les rochers qui se confondent avec la roche noire. On aperçoit les fameux fous à pattes bleues, si caractéristiques des Galápagos, les huîtriers au grand bec rouge,….
Au retour on fait la connaissance de Leticia, une jeune Argentine qui fabrique et vends des bijoux dans une petite boutique. On sympathise et elle nous offre un petit lutin en terre cuite: un compagnon porte bonheur pour notre mascotte Popeye!

Le même jour nous allons voir Agnès et Vincent, un couple de français dont nous ont parlé nos copains d'Umagumma qui sont passés ici le mois dernier. Ils sont tous deux biologistes et travaillent depuis 4 ans ici sur la pêche et les relations entre les pêcheurs, la réserve et le tourisme. Ca fait plaisir de parler un peu boulot… Deux types de pêche sont autorisées ici et se font en plongée à partir de barques équipées de compresseurs: les "pepinos" ou concombre de mer, en juillet et août, et la langouste de septembre à décembre. Mais il faut aller de plus en plus profond et les accidents de plongée sont fréquents.
Le reste de l'année les pêcheurs font des petits boulots pour certains: tourisme, travaux agricoles, ou bien ils attendent la saison de pêche suivante…
Agnès et Vincent sont très contents de voir des français et nous aident à organiser notre séjour, à connaître les endroits à visiter, les boutiques pour se ravitailler, car quand on ne connaît pas les lieux, ce n'est pas simple de s'y retrouver ici.
Pour la nourriture, par exemple, certaines boutiques sont plus ou moins bien achalandées, avec des produits pas toujours frais. Au petit marché, on trouve des produits locaux qui viennent de la zone agricole sur les hauteurs, mais les horaires d'ouverture ne sont pas évidents à saisir…
Pour la viande, les boucheries du marché proposent de la viande locale (bœuf, porc, chèvre) ainsi que du poulet congelé. Et pour le poisson, pas de poissonnerie, il suffit de demander aux pêcheurs.
Le coût de la vie, même s'il est presque double de celui de l'Equateur continental, reste abordable pour nous.


 

 

 


La nurserie des tortues

 

 

 

 


Un jeune homme de 180 ans

Le lendemain, nous allons faire une balade sur le chemin qui mène à la nurserie des tortues : un sentier aménagé par le Parc National des Galápagos, bordé de pierres de laves, et agrémenté de pancartes en bois. On traverse d'abord une lagune avec quelques oiseaux et un flamand rose. Le fond de la lagune est rose également et avec le vert de la végétation, le noir des roches volcaniques, le tableau est superbe. Sur le chemin on voit de nombreux iguanes, des lézards de lave au cou rouge…
La faune terrestre originelle des Galápagos est très curieuse: pas de mammifère, mais des oiseaux très variés et des reptiles: iguanes, lézards, tortues.
Cette faune est représentée par des espèces qui vivent uniquement ici, ce qui a donné lieu à la théorie de l'évolution de Darwin, du fait que celles ci aient évolué différemment dans ces îles isolées, et même, d'une île à l'autre, les espèces diffèrent.
Seule la faune marine comporte des mammifères: otaries et baleines.

On arrive au centre d'élevage, créé pour sauvegarder les tortues terrestres géantes du sud de Isabela. Les Galápagos abritent 11 espèces de tortues géantes (sur 12 dans le monde, la 12è espèce se trouvant en Afrique), et 5 de celles-ci vivent sur Isabela, chacune ayant un territoire correspondant à l'un des 5 volcans de l'île.
Les tortues étaient auparavant très nombreuses mais elles ont été décimées depuis 2 siècles: par les baleiniers d'abord qui les embarquaient pour servir de nourriture fraîche (une tortue peut vivre un an sans manger!), puis par les colons installés dans les îles et les prédateurs qu'ils y ont introduits : rats, cochons, chèvres… qui mangeaient leurs œufs.
Au moment où nous visitons, c'est l'heure du repas pour les tortues, et il faut voir ces reptiles attraper leurs feuillages. Il y a là quelques géniteurs de 180 ans, monstres de 1,5m de diamètre, et de nombreuses autres tortues plus petites. Dans les bacs de la nurserie, des centaines sont rassemblées, écloses depuis quelques années. Il faut dire qu'une tortue géante est adulte à 100 ans et peut vivre 450 ans! On les dirait sorties tout droit de la préhistoire et leur tête rappelle tout à fait celle de E.T.
Ici aussi, nous sommes les seuls visiteurs et on se promène tranquillement au milieu des enclos.

De retour sur Mateo, on nous hèle d'une annexe: c'est l'équipage de Florix, notre voisin:
"Les Mateo, on savait que vous veniez d'arriver ici, on l'a vu sur votre site internet".
Le monde est petit, on s'était échangé des mails dans les Caraïbes sans se connaître et on se retrouve ici en plein Pacifique.
Tous deux pharmaciens ayant arrêté leur boulot, ils sont de Sarzeau et naviguent depuis 4 ans sur leur "Super Maramu", un grand bateau hyper équipé, comme à la maison: machine à laver, four à micro-ondes, congélateur, TV avec groupe et desalinisateur pour alimenter le tout. Leur compagnie est très agréable, nous passerons pas mal de bons moments ensemble, à terre ou à bord. La veille de leur départ, ils nous inviteront sur leur bateau pour un super repas de cigales de mer achetées aux pécheurs du bateau voisin.




Un fou, dessiné par Florian

 


Le tunnel de lave

Le dimanche, l'équipage américain avait organisé une sortie avec un bateau local pour tous les voiliers présents. A 10h, toujours personne: ici les rendez-vous sont parfois oubliés. A défaut, nous sortons tous les 4 pour une balade à pied sur le sentier du "Mur des Larmes", un lieu qui abritait le bagne de l'Equateur dans les années 50. Ce chemin aménagé est plein de petits embranchements menant à des curiosités: tunnel de lave, puits de lave, lagunes, petites plages…
La végétation est aussi étonnante: cactus géants (de différentes espèces), et des oiseaux variés: flamands roses dans la lagune, coucous, martins pécheurs, pinsons de Darwin, canaris, ...

Le lendemain, les équipages des 5 voiliers se retrouvent au petit bar-restaurant situé sur la plage à coté du quai des pêcheurs, pour un almuerzo (repas du midi). Le coin est sympa, et le livre d'or du bar contient les messages de nombreux bateaux qui passent ici. En pleine saison, février-mars, il peut y avoir plus de 50 voiliers au mouillage! Nous y laissons notre petit message à notre tour.


 

 

 


Ballade à cheval

 

 

 

 

 

 


Goyave bien mure

Le mardi nous avons réservé à l'hôtel San Vicente pour une promenade à cheval sur le volcan, la Sierra Negra qui culmine à 1490m. Nous retrouvons à nouveau tous les équipages.
Nous partons en taxi, un pick-up aménagé de bancs en bois, jusqu'à la partie haute où nous attendent les chevaux.
Chacun se voit attribuer sa monture et notre groupe part vers le volcan. Les chevaux ressemblent à leur cavalier parait-il: celui de Sylvain donne des coups de sabots à ses voisins, ceux de Florian et Joëlle ont du mal à se supporter, celui de Dominique était docile mais tous ses copains l'empêchaient de doubler…
Arrivés à une clairière, on laisse les chevaux pour terminer à pied notre ballade et nous suivons Sebastian, notre guide, pour gravir le volcan: un pays de lave et de fumerolles, car celui-ci est en activité. On sent la chaleur qui sort par certaines anfractuosités. On voit encore les coulées laissées par le Volcan Chico, un cratère secondaire, en 1978. On distingue bien les anciennes coulées, rouges du fait de l'oxydation, des plus récentes bien noires. Et mêlées aux traces de soufre, cela forme une variété de teintes très étonnantes, des bleus nuits, des orangés, des jaunes… et des formes torturées.
Au détour du chemin, on aperçoit une mue de reptile, le serpent de lave, noir et gris est lové à coté.
Puis, c'est le retour : on retrouve la clairière aux chevaux. Là, après un pique-nique, on se goinfre de goyaves cueillies dans les arbres, bien mures et excellentes. Même les chevaux en sont friands.

Le lendemain sera un jour de repos pour récupérer, enfin pas vraiment car on a prévu de remplir la bouteille de gaz et il faut la trimballer du bateau au quai puis au village, porter la bouteille qui servira a la charge…. Heureusement qu'on a un diable pour cela.
Sur les conseils de Vincent nous allons trouver Juan qui est réparateur de frigos et bricoleur, et qui peut nous transvaser une bouteille équatorienne dans la notre. Il faut trouver une bouteille à emprunter ce qui n'est pas simple: un jour il y en a, le lendemain pas… On finit par en trouver une pour 7$ ce qui n'est pas bon marché mais on n'a pas le choix: l'approvisionnement dépend des passages du cargo, et en période de forte demande, comme en ce moment avec les "pepinos", les prix peuvent monter jusqu'à 25$! Les pêcheurs ont, en effet, besoin de beaucoup de gaz pour faire sécher leurs concombres de mer avant de les vendre.

Pour la traversée du Pacifique, nous préparons nos achats de produits frais. Agnès nous met en relation avec Meri qui nous accompagne dans la partie agricole sur les hauteurs (la partie haute, comme on dit ici): un paysage tropical très vert, des arbres fruitiers en quantité, des fermes plus ou moins exploitées…. Nous nous installons à l'arrière du taxi-pick-up, avec les copains du bateau "Florix" et montons par les pistes de poussière volcanique.
Dans la première ferme, un couple âgé vit isolé dans une case: on y a ramassé des quantités incroyables de fruits, pamplemousses, oranges, citrons, limas (un agrume jaune étonnant à l'odeur de citronnelle et au goût de mandarine) papayes, avocats, bananes qui parfois jonchent le sol tellement il y en a …Il est curieux de voir que toute cette richesse n'est pas exploitée. Puis une autre ferme nous fournit concombres, haricots, une autre des tomates, des poivrons, une autre des œufs… Nous qui pensions que les Galápagos étaient un désert, ce n'est pas vrai du tout.
Nous revenons chargés de 25 kg d'oranges, 15 de pamplemousses, 5 grosses papayes, un régime de bananes vertes, une dizaine d'avocats, ….



Une otarie, dessinée par Joëlle

 


Une otarie à bord

 

 

 


Les fous aux pattes bleues

Le jeudi, nous faisons une autre grande virée: avec l'ensemble des bateaux du mouillage, nous partons en vedette à moteur pilotée par Enri, au Cabo Roca. C'est la sortie qui était prévue le dimanche précédent, mais cette fois, avec juste une heure de retard, c'est la bonne. Après une heure de mer à longer la cote sud d'Isabela, on arrive dans un endroit insolite: il faut passer la barrière de vagues déferlantes, très impressionnante, et zigzaguer entre les récifs pour se retrouver au calme au milieu des rochers de lave, un véritable labyrinthe avec des tunnels, des arches sous-marines.

L'eau n'est pas chaude, 20 degrés et on n'y reste pas très longtemps. Les fonds ne sont pas très colorés, on trouve un tout petit peu de corail et beaucoup de lave, par contre la faune est étonnante: de grosses tortues marines de 1,20 à 1,50m, des otaries, des poissons tropicaux de grande taille (les perroquets et les chirurgiens font ici près de 50 cm !) et on peut s'en approcher très près car il n'y a pas beaucoup de prédateurs.
En relevant la tête près des rochers, on se retrouve nez à nez avec des fous à pattes bleues qui ne s'envolent que quand on s'apprête à les toucher.
Après un petit pique-nique, la journée se prolonge par une balade en kayak, apportés par l'équipage américano-mexicain de "Libre", puis un tour en annexe pour débarquer à terre et voir les iguanes autour des piscines de lave.
Pour le retour, la sortie est encore plus impressionnante : le bateau, moteurs à fond, saute sur les vagues et retombe sèchement. Tout le monde applaudit le pilote quand on se retrouve en eau plus calme, et celui-ci fait son signe de croix!

Voici déjà près de 10 jours que nous sommes là et il faut préparer le bateau pour la traversée vers les Marquises. Grâce au dessalinisateur de Florix, nous complétons notre plein d'eau et Joëlle fait une lessive avec leur machine. Nous commandons notre pain dans le village, et passons une soirée chez Leticia et son copain Pablo, après les avoir invités la veille sur Mateo: ils aimeraient bien aussi embarquer sur un voilier pour aller jusqu'en Polynésie l'an prochain.
Meri, qui nous aura aussi accompagnée pour les achats de viande, nous dit un au revoir ému et nous embrasse, et nous allons prendre un dernier café chez Agnès et Vincent avant le départ.


              


  Equateur

(1er juillet - 5 août 2005)

 


Une rue de Manta

 

 

 


Inventaire des réserves

Nous sommes bien contents d'être arrivés à Manta, après cette traversée un peu laborieuse.
Ce qui nous surprend le plus en arrivant ici, après une dizaine de jours en mer, c'est le bruit permanent: circulation, autos, bus, camions, sur le boulevard qui longe la mer, klaxons, musique, radios à fond jusqu'à des heures tardives, moteurs hors-bord des barques qui circulent par dizaines dans le port, cris et sifflements des pêcheurs pour appeler les bateaux-taxis, et cela même la nuit.
Une autre chose aussi, c'est la saleté et le peu de respect de l'environnement: l'égout municipal qui se déverse à une centaine de mètres du yacht club rend les eaux troubles et une odeur pas agréable nous parvient par moment. Tous les jours, une poussière fine et noire se dépose sur les bateaux, les pontons, et il faut laver le pont régulièrement. Dans les eaux du port flottent toutes sortes de déchets, bouteilles et emballages en plastique ou polystyrène, et même parfois dans la piscine du Yacht-Club après le week-end.

Le yacht-Club de Manta où nous sommes amarrés est un havre de luxe au milieu de la ville: tennis, piscine, les enfants attendaient ça avec impatience et en profitent tous les jours.
Les premiers jours sont consacrés aux formalités: les autorités portuaires ne voient pas beaucoup de voiliers et il faut revenir 3 fois avant de pouvoir faire les papiers d'entrée, en versant 42 dollars… Pour l'immigration c'est plus simple mais il faut aller à l'autre bout de la ville en taxi, et y laisser 30 dollars supplémentaires.
Notre première tâche en arrivant à Manta sera un grand nettoyage: avec le climat chaud et humide de Panama, de la moisissure s'est installée un peu partout: vêtements, coussins, coffres…
Après un an de navigation c'est l'occasion d'un grand ménage et d'un inventaire complet de nos réserves. Ici nous pouvons bénéficier de l'eau à volonté grâce à un tuyau branché sur le ponton à 30m du bateau, et de supermarchés pour compléter nos stocks à des prix intéressants.


 


Angèle arrive à bord

 

 


L'anniversaire de Florian

Pendant 10 jours nos matinées seront bien occupées, l'après-midi étant plutôt réservé à des balades en ville, à la plage, la visite du musée ethnographique de Manta, qui retrace la vie des peuples ayant habité les lieux avant la colonisation. Manta est une grande ville, aux rues tirées au cordeau, sans charme ni vieux monuments. Elle s'étale le long du port et du "malecon", l'avenue qui borde la mer, avec ses constructions sans architecture, allant du building moderne au taudis en tôle.

Il ne fait pas bon être piéton dans ce pays, et quelque soit la signalisation, la couleur du feu, c'est la voiture qui passe d'abord. Et la circulation est intense, voitures, camions, des centaines de taxis jaunes, des bus de toutes couleurs…

Nous fêtons aussi l'anniversaire de Florian, qui a 13 ans le 7 juillet, en lui promettant de recommencer quelques jours plus tard avec ses copains.

En effet, le 11 juillet, nous accueillons des visiteurs à bord de Mateo: Angèle arrive de France, avec son fils Yann, un copain de classe de Florian, ainsi qu'un autre copain de Yann, Jean-Gabriel. Ils ont débarqué à Guayaquil la veille, et arrivent en bus dans l'après-midi, fatigués de leurs 24h de trajet et contents d'être arrivés. Les enfants les attendaient avec impatience, et nous aussi...

Ca fait un sacré changement à bord, 4 garçons, 3 adultes, les bagages… mais on s'organise bien pour garder un espace vital suffisant. Ca fait drôle de revoir des amis à l'autre bout du monde et après un an de séparation, un moment d'émotion, un moment aussi de bonheur d'ouvrir courriers et colis qu'ils nous apportent. Nous fêtons l'anniversaire de Florian une nouvelle fois, et il est tout heureux de recevoir en cadeau le couteau Opinel dont il rêvait.


 


Le terminal des bus

 

 


Chez Maria-Luisa

Avec eux, nous prenons 12 jours de vacances pour aller faire une virée dans l'intérieur.
Nous préparons nos sacs à dos, mais quelques heures avant de partir, Angèle se rend compte que son portefeuille a disparu de sa sacoche: perte ou vol pendant son trajet, on ne saura pas. Il faut en vitesse faire une déclaration au commissariat local, dans un vieux bureau, suranné.

Le départ à lieu le soir, à 21h: nous prenons le bus de nuit qui nous emmène à Quito, la capitale située sur les hauts plateaux à 2850 m d'altitude, où nous arrivons à 6h le lendemain matin. A 7, c'est toute une expédition.
Le bus part sur les chapeaux de roues: il y a plusieurs compagnies concurrentes sur le même trajet et c'est à celui qui prendra les clients le premier.

Arrivés au terminal de bus de Quito à 6 heures du matin, on se fait sauter dessus comme des touristes. Sans rien demander, nos sacs sont déposés dans un taxi, une dizaine de personnes étant prête à nous aider, moyennant dollars bien sur. Et comme le lieu a mauvaise réputation, on stresse un peu. Heureusement on avait réservé un hôtel par téléphone depuis Manta. En fait "La Casa d'Elisa" étant complet, c'est chez Maria-Luisa que nous allons, dans un appartement d'un quartier éloigné. Elle est la sœur de la propriétaire de l'hôtel, et rentabilise ainsi son logement, en attendant de monter à son tour une petite auberge.
Nous nous installons et faisons une grande sieste réparatrice. En début d'après-midi, nous partons en bus puis en trolleybus vers le centre ville de Quito, pour y manger un morceau. Pour faire plaisir aux enfants, c'est dans un Chicken Burger que nous allons: ici, pas de couverts, c'est avec les doigts et des gants en plastique qu'on mange! Un petit tour dans les rues de la ville coloniale, et il est l'heure de retourner à notre appartement.


 


L'experience de Coriolis

 

 


Tissage Indien

Le lendemain matin un sérieux petit déjeuner nous est préparé par Maria-Luisa: petits pains, fromage, fruits et jus de fruits, accompagné de café, thé ou chocolat. Nous sommes bien calés pour aller faire un tour à Mitad del Mundo ("Le Milieu du Monde"), en prenant le tout nouveau métrobus de Quito.
Cet endroit, situé à une dizaine de kilomètres de la capitale, est le lieu où une mission géodésique française, menée par Charles de la Condamine, est venue en 1736 faire des relevés pour déterminer la position de l'Equateur. C'est devenu un vaste centre touristique avec musées, boutiques, restaurant de luxe, …
Nous visiterons le musée Inti Nan ("Le Chemin du Soleil"), privé et plus modeste, mais plus intéressant que le grand musée touristique.
Une partie du musée propose des expériences pour montrer quelques effets dus à la latitude zéro: le changement de sens de rotation de l'eau du à la force de Coriolis, la mise en équilibre d'un œuf sur un clou, et la perte de force musculaire que l'on ressent lorsque l'on est sur la ligne: étonnant! Différents cadrans solaires permettent de comprendre équinoxes, solstices et autres évènements liés aux mouvements du soleil.
On y découvre aussi un habitat typique des Andes, un soubassement en pierre, le reste en bois en terre et en bambou. L'entrée est basse, obligeant ainsi les arrivants à baisser la tête pour saluer les occupants.
Y sont aussi présentées différentes coutumes locales: tir à la sarbacane, auquel chacun s'est essayé, explication du procédé de réduction des têtes (sans commentaire), tissage des superbes couvertures andines. Quelques lamas en captivité complètent le tableau.
Après y avoir passé quelques heures, nous allons manger dans une cabane typique et crasseuse, où nous goûtons la cuisine locale.

Puis nous redescendons dans le centre ville historique pour y admirer de nouveau les vieux monuments: le monastère Santo Domingo, la Plaza del Independencia avec le palais du Président de la République. Il y a ce jour là une manifestation d'Indiens, qui revendiquent très pacifiquement des droits identiques aux autres Equatoriens, droits pourtant inscrits dans la Constitution.

 

 


Chapeau panaméen

Le lendemain, réveil plus matinal: nous prenons le bus pour Otavalo, une ville située à 2 heures de route au nord de Quito. C'est samedi, jour de grand marché. Celui-ci est connu pour être le plus important du pays, car les Indiens des environs y viennent pour vendre artisanat de toute sorte, fruits et légumes.
Des dizaines de cars amènent touristes et autochtones, et il y a du monde à se faufiler entre les stands sur la place du marché, la Plaza de los Ponchos, ainsi que dans toutes les rues adjacentes.
Nous y faisons nos achats: chapeaux de Panama, instruments de musique (flûtes, ocarinas), tissages de toutes sortes, ainsi que bonnets et gants pour une prochaine rando sur les volcans. Il faut marchander, car ça fait partie du jeu.
Le midi, nous prenons un almuerzo, composé d'une soupe copieuse (légumes et poulet) et d'un plat de viande, légumes et riz, le tout pour 1,5 $ par personne. Un vieux monsieur très pauvre viendra s'asseoir à côté de nous et nous regardera manger. Nous sommes mal à l'aise.
Un groupe de musiciens traditionnels se produit dans un coin du marché, le tableau est complet…

Le soir, pour notre dernière soirée chez Maria-Luisa, elle nous sert un Cuba Libre (rhum et coca), et nous lui faisons un petit concert de chansons françaises. L'accueil très familial, la gentillesse et la disponibilité de Maria-Luisa nous laisserons un bon souvenir.


 

 

 

 


Vue sur Riobamba

 

 

 

 


L'hotel Nuca Huasi

Nous quittons Quito le lendemain et prenons le bus pour Riobamba, située près de 200 kms plus au sud en plein cœur des volcans. Pas de problème pour trouver le bus à la gare, les rabatteurs sont efficaces et crient à tue-tête pour attirer le client. On voit de tout sur les toits des bus: frigos, vélos, bagages en tout genre et même un mouton vivant! Le bus s'arrête souvent pour prendre ou descendre des passagers: à chaque fois des petits vendeurs en profitent pour proposer boissons, beignets, friandises…. Le trajet n'est pas rapide mais on ne s'ennuie pas. Le bus est souvent bondé, certains restent debout dans le couloir. Ce sont ces voyageurs supplémentaires, sans ticket officiel, qui permettent au chauffeur et à son aide d'arrondir leurs fins de mois.

En descendant vers le sud le paysage devient plus verdoyant, par rapport aux montagnes à la végétation rase autour de Quito. Ce qui surprend aussi, c'est qu'il y a des constructions tout le long de la route: il est rare de trouver plusieurs kilomètres sans maison. Par endroit on voit quelques jolies constructions, toit de tuile et balcon de bois mais la plupart du temps, c'est plutôt parpaing et ciment, étages non terminés, peintures craquelées…

Nous arrivons à Riobamba en fin d'après midi. Nous nous dirigeons à l'hôtel Nuca Huasi en plein centre ville. Un hôtel défraîchi pourtant situé dans une jolie maison coloniale avec un patio, mais dont l'entretien et la propreté laissent à désirer à commencer par les toilettes, régulièrement bouchées. Dominique ou Angèle n'hésiteront pas à prendre la ventouse pour vider les cuvettes et à les désinfecter !. Même les lits avec leurs ressorts saillants auraient bien besoin de neuf! Mais ce n'est pas cher (3$ par adulte et 1,5$ par enfant) et bien situé, alors pour quelques jours on s'en contente.
Le soir, sur les conseils du Guide du Routard, nous allons manger chez Rosa à 2 pas de l'hôtel. Ses "cheviches", sorte de salade de tomates oignons et poivrons accompagnée de poisson mariné au citron, et ses "camarones" (crevettes) sont délicieux, et Rosa aime bien les français, elle, dont l'instituteur leur faisait chanter la Marseillaise toutes les semaines! On termine par une petite promenade en ville et puis on va se coucher.

Le lendemain, un petit tour dans le jardin public nous offre une superbe vue sur le Chimborazo, le volcan le plus haut de l'Equateur avec ses 6310m, qui domine la ville de ses glaciers. On va ensuite au bureau de Alta Montana, une agence qui organise balades et treks en montagne. On essaie de négocier une balade à cheval, mais le tarif est élevé, on choisit donc le taxi qui nous montera jusqu'au bout de la route au premier refuge.
Un almuerzo en ville, quelques courses, les enfants passent une partie de l'après-midi à jouer à cache-cache au jardin public, ce qui nous rajeunit…
En ville, des enfants traînent toute la journée: déposés le matin par leurs parents, certains très jeunes, essaient de glaner quelques pièces en abordant les touristes ou en vendant quelques friandises.
Le soir on mange sur le pouce un "salchipapa" (frites-saucisse) au marché, un immense hangar en tôle ouvert à tous vents. On espérait ensuite entendre un concert sur la place centrale, mais ce n'est pas la saison.


 

 


Au refuge Whymper

Le lendemain, mardi, après un desayuno (petit déjeuner) copieux à l'hôtel, le taxi de Napoléon nous attends: un vieux break Mazda où l'on s'entasse, 3 enfants contents de monter dans le coffre.
La vallée qui monte est verte et peuplée de village d'Indiens, que l'on croise à pied ou à cheval, ou en famille dans les champs. Puis on traverse un paysage désertique de pierre de lave, où un groupe de vigognes, cousins des lamas, détale à notre arrivée. On monte dans le brouillard et on arrive au refuge à 4800m où la neige fraîchement tombée ravit les enfants et les plus grands !
Il fait très froid, et on a bien fait d'emporter polaires, vestes, gants et bonnets. On part pour une petite marche vers le deuxième refuge à 5000m. A cette altitude, le souffle est court, les jambes lourdes, il nous faudra près de 2 heures pour monter le sentier pentu. Mais quelle satisfaction de se retrouver à une altitude plus haute que celle du Mont-Blanc, même si le taxi nous a bien aidé; Jean-Gabriel sort sa flûte pour fêter cela et joue un petit air dans la neige. Avec Florian qui crapahute bien nous montons tous les deux un peu plus haut voir un petit lac gelé.
Au refuge, des groupes français, espagnols, allemands, se préparent pour aller au sommet, mais ce n'est pas pour nous, il faut être alpiniste chevronné !
Nous ne verrons pas le sommet, caché par sa calotte de nuages, mais quelques éclaircies nous permettront de voir scintiller les glaciers et neiges éternelles.
On redescend pour retrouver Angèle et Yann au premier refuge et prendre ensemble le pique-nique et un bon thé chaud. Le taxi nous attend pour redescendre à Riobamba.


 

 


La foule à la gare

 

 

 


Sur le toit du Train des Andes

 

 

 


Arret déchargement

 

 

 


Vue sur la descente

De retour en ville, nous allons directement à la gare chercher nos billets pour le lendemain, pour prendre le célèbre "Petit Train des Andes", qui relie Riobamba à Alausi sur les 100 kms de voie encore en état dans ce paysage montagnard. Une attraction que des centaines de touristes empruntent chaque semaine, car le train ne circule que les mercredi, vendredi et dimanche. Le petit commerce s'est développé ici aussi et le señor Lopez loue ses petits coussins pour s'asseoir sur le toit des wagons: en effet à part 2 wagons avec sièges, c'est sur le toit des voitures de marchandises que la majorité des gens font le trajet, ce qui en rajoute au spectaculaire.
Nous prenons un dernier repas chez Rosa avant de partir, elle entonne la Marseillaise avec nous pour fêter cela.

Mercredi, lever très matinal, car il faut être à 6 heures à la gare, soit 1 heure avant le départ pour avoir une bonne place sur le toit! Alors qu'on n'avait pas vu beaucoup de routards jusque là, il en arrive par dizaines pour monter sur le train. C'est la bousculade, les touristes européens sont beaucoup moins civilisés que les Equatoriens qui font sagement la queue pour le bus ou le trolley !
Le train hors d'age est tiré par une vieille locomotive française presque centenaire.
A coté un faux train moderne attend un groupe de vieux touristes américains, ce qui casse un peu le charme !
Enfin au petit jour le train démarre, traversant d'abord les faubourgs un peu bidonville de Riobamba.
On traverse des villages Indiens, pauvres et poussiéreux, dont les enfants courent après le train pour attraper les bonbons que leur jettent les touristes... Florian trouve que ça fait un peu zoo, comme si on jetait des cacahuètes à des singes !
Les pentes des montagnes sont tapissées de champs, qui forment de jolis damiers et parfois on se demande comment c'est possible de cultiver de tels endroits aussi abrupts.
Quelques gares sont l'occasion d'une halte, et sur les quais c'est une cohue de vendeurs, de stands de nourriture et d'artisanat, tenus par des Indiens aux costumes colorés.
On s'arrête parfois aussi en pleine campagne, pour débarquer quelques marchandises ou prendre des Indiens qui n'ont pas d'autre moyen de transport dans ces lieux isolés.
Certains défilés sont impressionnants, resserrés entre deux falaises, ou surplombant des à-pics vertigineux.

On enjambe quelques rivières sur des ponts de bois dont il ne vaut mieux pas imaginer si une commission de sécurité est venue les vérifier.
Les enfants et Angèle sur le toit en prennent plein les yeux, mais pour Joëlle et moi dans le wagon ce n'est pas mal non plus, confort sommaire des vieux sièges en cuir en plus.
Comme dans les bus, des petits vendeurs défilent à longueurs de temps, escaladant sans problème les toits des wagons en marche, pour nous ravitailler en boisson, gâteaux, beignets.
Une autre région que l'on traverse est un désert de sable volcanique, contrastant par rapport à la verdeur des autres passages.

Le dernier tronçon est encore plus spectaculaire: pour rejoindre la Nariz del Diablo, le train descend la montagne en quelques kilomètres par un curieux système de zig-zags où l'on change de sens à chaque fois. A chaque aiguillage, il faut surveiller que le train ne déraille pas.
Puis c'est une dernière remontée vers Alausi, le terminus, où nous arrivons en début d'après-midi.
Pas le temps de traîner, il faut attraper un bus pour terminer notre route vers Cuenca, près de 200 kms plus au sud, où nous avons prévu de coucher. C'est aussi la ruée pour monter dans le dernier bus de la journée et on arrive in extremis à avoir les 6 places restantes, Sylvain fera le voyage sur mes genoux.
On atteint Cuenca vers 18h, crevés et sans avoir eu le temps de manger vraiment. On arrive à temps pour avoir les deux dernières chambres à l'hôtel Pichincha, très propre, calme et confortable après celui des jours précédents. Cette fois encore, les 4 jeunes se retrouvent dans la même chambre, ce qui les ravit, même si parfois les 3 "grands" aimeraient bien que Sylvain les laisse entre eux.
Le restaurant El Tunel, juste à coté de l'hôtel, nous servira une merienda (repas du soir, soupe et plat comme le midi) très appréciable, avant une bonne nuit de sommeil réparateur.


 

 


Eglise San-Sebastian à Cuenca

 

 

 


Concert d'indiens

Nous passerons 4 nuits à Cuenca, tellement la ville est agréable et tellement il y a de choses à y voir. Il s'y tient la "2eme Assemblée pour la Santé des Peuples", un colloque sur l'environnement et la santé qui regroupe 80 peuples et pays en développement, en majorité d'Amérique du Sud mais aussi d'Asie, d'Afrique. ce qui ajoute à l'ambiance. Quel contraste avec les autres villes que nous avons vues précédemment qui semblaient assoupies.
Le centre ville a gardé ses maisons coloniales, ses églises par dizaines, le tout bien restauré, propre et entretenu, à la différence de beaucoup d'autres agglomérations du pays. Il faut dire que Cuenca est classée au Patrimoine Mondial de l'Humanité, ce qui explique les choses. L'ambiance y est aussi différente, plus européenne, les Indiens étant moins nombreux dans cette région que plus au nord.
Les toits des maisons sont en tuile, les façades repeintes de couleurs vives, et des petits balcons de bois ornent les étages. On passe des heures à se promener dans les rues, à découvrir au hasard une église avec ses dômes, un jardin public, une entrée de maison où en pointant son nez on nous invite à admirer un joli petit patio fleuri.

Près de la petite église de San Juan toute blanche, on visite le musée d'Art Moderne qui abrite une collection d'aquarelles de différents pays d'Amérique du Sud. Le lieu est superbe, entourant 3 patios à colonnades aux jardins fleuris. Le midi, on pique-nique dans le square public qui le borde avant de redescendre vers le Rio Tomebamba qui longe le centre-ville, et où des femmes lavent leur linge.
Puis nous allons visiter le Musée des Cultures Indigènes qui présente 5000 pièces des peuples indiens ayant habité successivement le pays depuis 500 avant J-C: poteries, bijoux, figurines des cultures valdivia, tolita, bahia, cañari, puis inca juste avant la colonisation espagnole.
Le soir, nous retournons à l'Auditorium de Musée d'art Moderne pour un concert classique d'airs d'opéra. Toute la bourgeoisie européenne de Cuenca est là, habillée, et nous faisons un peu tâche au milieu.
Après la musique classique, en traînant dans les rues, on se retrouve par hasard sur une place où a lieu un concert organisé par le Parti Communiste et la Fédération Etudiante locale: discours sur la libération des peuples, Cuba et Che Guevara, l'ambiance est très soixante-huitarde. On danse sur des airs de salsas et autres musiques avec des gens de tous horizons. Jean-Gabriel n'est pas en reste, les autres garçons sont rentrés se coucher à l'hôtel. Joëlle a même été invitée à danser avec un Indien en costume traditionnel.


 

 


Vue sur la ville de Cuenca

Le lendemain matin, avant que la ville et le reste du groupe s'éveille je me promène dans le quartier de la Cathédrale: les petits cireurs de chaussure se mettent en place, les stands de cierges et les mendiants s'installent sous le porche, et je prends un excellent expresso au Café Raymipampa avec son curieux lustre en fil de fer et morceaux de vaisselle cassée.
Nous retournons en ville avec Joëlle, les enfants étant restés à l'hôtel avec Angèle: ce n'est pas souvent que l'on peut se balader ainsi tous les deux, et au hasard des coins de rues on découvre jolies échoppes, patios aménagés et églises ornementées.

Plus tard, le patron de l'hôtel Pichincha nous invitera tous les sept à monter sur la terrasse d'où on a une jolie vue sur le centre de Cuenca, sur les toits de tuiles, les nombreux dômes et flèches des églises.
Après un petit pique-nique dans le square de l'église des San Blas, nous nous séparons : Florian rentre à l'hôtel avec Joëlle car il a attrapé une tourista, Angèle va à la marche de clôture du colloque des "Peuples Solidaires" avec Yann et Jean-Gabriel et moi et Sylvain visitons le musée et le site Inca de Pumapungo. Aménagé sur un grand terrain il surplombe le Rio: les restes de clôtures, soubassement de bâtiments, de canaux d'irrigation donnent une idée de cette civilisation évoluée. Le musée associé, dans la Banque de l'Ecuador, présente dans une section ethnographique de superbes mises en scènes des différents groupes ethniques qui composent le pays: Indiens des Andes, Indiens d'Amazonie, Noirs de la cote nord et Métis de la Costa.

Le soir, après s'être cherchés en ville, on se retrouve tous pour le dernier concert du colloque. L'ambiance y est aussi chaleureuse, on trinque au rhum avec un groupe d'indiens d'Amérique du Nord en costume traditionnel: il y a même le totem !


 

 

 


La fabrique de chapeaux

 

 

 

 


Le parc de Cajas

 

 

 

 


Montañita, station branchée

Pour notre dernier jour à Cuenca, nous faisons la visite d'une fabrique de chapeaux de Panama, réalisés en fibres tressées, et mis en forme dans une presse à chaud: ces couvre-chefs sont devenus célèbres lors de la construction du Canal de Panama, car ils étaient portés par les ingénieurs français et furent ainsi rapportés en France.
Le midi, les enfants préférant rester jouer à l'hôtel, les 3 adultes décident d'aller manger au marché. Des petites dames y préparent du cochon grillé savoureux, et joliment présenté, tête comprise sur de grands plats ronds, accompagné de légumes frits, maïs, boulettes de pommes de terre. Une spécialité locale dont nous nous régalons.
L'après-midi, nous passerons notre temps au téléphone pour réserver un hôtel à Montañita sur la côte, notre prochaine étape. Dans cette station de surf à la mode ce n'est pas facile de trouver à se loger à 7 à un prix raisonnable, d'autant que c'est le week-end.

De nouveau nous montons dans le bus de bonne heure le lendemain: la route est longue et il faut changer à Guyaquil pour prendre une correspondance pour la cote.
En quittant Cuenca, on traverse le Parc National de Cajas: de superbes montagnes, des torrents et des quantités de lacs, on se croirait un peu dans les Pyrénées. A cette altitude il ne fait pas chaud et la gelée blanche recouvre les versants des vallées.
Des sentiers de randonnées sont aménagés dans ce parc, et il aurait été bien agréable de s'y promener.

Puis petit à petit on quitte les hauteurs pour redescendre vers la plaine côtière. En quelques kilomètres, la végétation change totalement et de montagnarde, elle devient tropicale: fougères arborescentes, palmiers, bananiers.
Seul bémol, les bords de route sont toujours jonchés de détritus et emballages jetés par les passagers des nombreux autocars qui y circulent.
Dans la plaine, place aux grandes haciendas spécialisées: sur des centaines d'hectares s'étendent des plantations de café, de cacaoyers, de canne à sucre, de bananiers. Parfois on y aperçoit des travailleurs à cheval, comme dans les films de cow-boys.

Sur la côte, le paysage devient carrément aride: des villages poussiéreux, aux maisons jamais finies, le contraste avec la région de Cuenca est important. Nous longeons des marais salants avec leurs gros tas de sel blancs, se détachant sur l'ocre de la terre.
Arrivés à Montañita, nous cherchons l'hôtel El Pelicano: surprise, il est situé à coté d'une boîte de nuit où la musique techno donne "à donf". Le gérant rasta nous montre nos chambres, toutes en bois et en hauteur, aux lits douteux couverts d'une moustiquaire. La mascotte de l'hôtel est un boa constrictor qui dort sagement dans sa cage au milieu du patio... Les enfants sont ravis de ce cadre "branché", nous un peu moins.
Après un tour dans la ville, quelques rues animées avec des bars, des restaurants, des hotels en bambou, des boutiques de surf et d'artisanat, où déambule une population jeune et au teint clair, nous prenons notre repas du soir chez un chinois qui fait de copieuses pizzas, puis nous rentrons à l'hôtel. La nuit sera agitée et nous aurons du mal à fermer l'oil, la boîte marchant à fond jusqu'au petit matin, et l'hôtel étant sillonné par les va et vient des occupant(e)s en tenue légère.
On se souviendra de ce dernier hébergement de nos vacances !

Le lendemain, après une grande balade sur la plage et une baignade pour les enfants, nous reprenons le bus pour Manta où nous arrivons en fin d'après-midi. Nous retrouvons Mateo que nous avions laissé à la garde de René, un des marineros du Yacht Club, qui dormait à bord toutes les nuits pendant notre absence. On est bien content de retrouver notre chez-nous, de se reposer après cette grande virée.


 

 

 


A la piscine du Yacht-Club

 

 

 

 


Grand ménage à bord

Nous avions prévu de nettoyer la coque du bateau avant de quitter Manta, car ici l'amplitude de la marée, plus de 2 mètres, le permet, ce qui ne sera pas le cas ensuite dans les îles du Pacifique. Nous allons donc un matin poser Mateo sur la plage au milieu des bateaux de pécheurs habitués à caréner ici. Angèle, Yann et Jean-Gabriel sont ravis de nous aider pour cette opération.
C'est la première fois que nous nous posons ainsi, mais cela se fait sans problème, le catamaran étant prévu pour. Par contre c'est l'attraction pour la population car c'est sans doute la première fois qu'ils voient un voilier s'échouer ainsi, et nous sommes assaillis par des curieux et surtout par des gens qui veulent nous aider, moyennant finance, à gratter la coque. Certains viennent aussi nous demander à manger, et nous ferons tour à tour office de soupe populaire (Angèle passera son temps à faire et à distribuer des sandwiches), de bureau d'embauche, et de lieu de rassemblement.
Ici, un propriétaire de voilier est forcément un riche, et c'est difficile de faire croire le contraire, vu la pauvreté de certains, qui vivent au jour le jour en se demandant si ils pourront gagner les quelques dollars leur permettant de nourrir leur famille le lendemain. Le capitaine a bien du mal à gérer cette affluence, et il faudra discuter un moment, quitte à y laisser quelques dollars et quelques bières, avant de pouvoir calmer tout ce monde !
Avec l'aide de deux équatoriens nous serons quatre pour peindre l'antifouling sur la coque et le travail sera vite terminé.
Nous attendons quelques heures que la marée remonte et il fait nuit pour rejoindre notre mouillage au Yacht-Club. Comble de malchance, le moteur bâbord fait des siennes et s'arrête juste avant d'y arriver. Il faudra s'aider de l'annexe pour parvenir à amarrer le bateau sur sa bouée. Cette fois, c'est le filtre à gazole qui est la cause de ce problème: sans doute est-il colmaté, car après l'avoir changé le lendemain, tout rentre dans l'ordre.

Pour nos visiteurs les vacances sont terminées et le lendemain du carénage nous les accompagnerons au bus qui les ramène à Guyaquil d'où ils prendront leur avion de retour. Ils sont contents de leur séjour à bord et nous avons beaucoup apprécié leur compagnie.
Pour nous aussi l'escale à Manta se termine: un nouveau plein de nourriture au supermarché est nécessaire pour compléter nos stocks, et il faut en profiter car dans les îles du Pacifique les prix ne seront pas les mêmes. Nous ferons également les pleins de gazole et d'eau, et une dernière grande lessive.
Notre départ sera retardé d'une journée: au dernier moment, notre bouteille de gaz nous lâche. Arrivé à l'usine de gaz, ce n'est pas possible de la recharger : ils ont perdu le tuyau de remplissage adapté, alors que 4 semaines auparavant nous avions pu le faire sans problème!

Après un dernier nettoyage du bateau, toujours couvert d'une poussière noire, nous quittons le port de Manta en fin de matinée. On zigzague entre les chalutiers avant de gagner la haute mer, cap à l'ouest vers les Galápagos.


Le circuit de notre balade en Equateur
(cliquez pour agrandir)


              


  Traversée Panama-Equateur

(21 juin - 1er juillet 2005)

 

 


Passager clandestin

Depuis notre départ de France, c'est la première fois que nous avons à faire une traversée au près, c'est-à-dire en remontant contre le vent. En plus dans ces parages, le courant s'en mêle, ce qui n'arrange rien. Une traversée qui en ligne directe aurait durée 5 à 6 jours nous en demandera presque le double.
Au départ, le vent est faible, la mer belle, et c'est une nouvelle fois au moteur que nous parcourons presque le premier tiers de la route.
La première nuit est encore très orageuse, on surveille les éclairs mais ils semblent rester sur la cote.
Puis le vent se lève peu à peu, de sud-ouest c'est-à-dire de la direction où nous allons. Nous allons donc devoir tirer des bords, un bord vers la côte, un bord vers le large.
A cette allure de prés serré Mateo n'est pas à son aise, et son équipage pas entraîné, car nous avions juste tiré quelques bords dans la baie de Quiberon avant notre départ, ce qui n'avait pas grand chose à voir…. Il faut donc tester les réglages, ce qui n'est pas évident, car le vent n'est pas régulier en force, et des rafales arrivent sous les grains. Alors on est souvent sous toilés et on n'avance pas vite. C'est impressionnant comme à cette allure les efforts sont importants, surtout sur l'écoute de grand-voile: on se demande parfois si tout ne va pas s'arracher, mais non, ça tient.
Par moments on triche un peu, et un moteur au ralenti vient aider les voiles et nous permettre de gagner quelques degrés sur le cap.


 

 


Après-midi en mer

Nous essayons de rester a bonne distance de la côte colombienne qui a mauvaise réputation: une grande partie de la drogue à destination des USA vient de Colombie et il faut bien qu'elle passe par quelque part. Les bruits de piratages dans les Antilles, en particulier dans ce secteur, courent sur les pontons, même si il y a sans doute beaucoup de rumeurs.
A une centaine de milles des côtes nous voyons parfois des bateaux qui ressemblent à des bateaux de pêche. Certains s'approchent de nous et nous ne sommes pas rassurés: on démarre les moteurs pour s'en éloigner rapidement car on ne sait jamais. Ce serait bête de se faire pirater ici …
Mais Big Brother veille quand même: nous serons survolés à basse altitude par un avion des Cost-Guards américains qui patrouillent dans le secteur.

Au quatrième jour, on se demande si on a bien fait de choisir de descendre vers l'Equateur: le vent forcit, la mer aussi et le courant contraire, près d'un nœud selon les documents nautiques, font que l'on progresse très doucement vers le but. On aura jusqu'à 20 nœuds, parfois plus dans les rafales et 2 mètres de creux ce qui n'est pas rien a cette allure. Mais comme on a rendez-vous début juillet avec une amie qui doit nous rejoindre à Manta avec deux copains des enfants, il faut bien y aller.
Il y a parfois un petit moment de démoralisation au bout de quelques jours de navigation, surtout quand le temps n'est pas très beau, et que s'y ajoute la fatigue des quarts, le manque d'appétit, mais heureusement ça ne dure pas et on retrouve la forme en peu de temps.
Mais même si on rêve parfois d'un bon monocoque qui remonterait mieux au près, on apprécie beaucoup le confort de Mateo: naviguer à plat au près serré, ça change la vie !!


 

 


Concours de Puissance 4

Dans cette traversée on rencontrera pas mal de cargos: on croise plusieurs fois, au hasard de nos bords, la ligne du trafic maritime entre Panama et l'Amérique du Sud. Nous avons mis en route notre mouchard, le Mer-Veille qui fait bip-bip lorsqu'il détecte un radar dans son entourage. La plupart des cargos semblent l'avoir en marche dans les parages, mais ce n'est pas le cas des bateaux de pêche et il faut quand même faire une veille vigilante en permanence.

La zone nuageuse que nous traversons en descendant s'appelle la ZITC, zone inter tropicale de convergence. Elle sépare les zones d'alizés des hémisphères nord et sud. A cette époque elle est située assez nord, mais est très large à proximité des côtes colombiennes. Nous ne la quitterons que vers 1 degré 30 N, pour trouver des conditions plus stables.

Les activités à bord sont différentes des autres traversées: fini le Cned, on peut penser à autre chose: la lecture d'abord qui occupe des heures, et puis les enfants ont ressorti tous les jeux de société: on fera donc un concours de Puissance 4, des parties de Jeu des 7 Familles, d'échecs …
On ressort aussi les instruments de musique, et on passera un après-midi à jouer et chanter des chants de marins, à l'aide d'un CD.

Nous voyons aussi beaucoup d'animaux: des dauphins très joueurs font des bonds de plusieurs mètres, un fou-de-bassan qui vient passer quelques heures posé sur le roof. Comme des calamars sont tombés la nuit précédente sur le pont, on a même de quoi le nourrir…On retrouve aussi quelques poissons volants.
Toutes sortes d'oiseaux, fous, frégates, et de nombreux autres inconnus survolent le bateau. Même la nuit on aperçoit leurs ombres autour de nous.
Le plus féerique, ce sont les traînées de plancton fluorescent qui ornent le sillage de Mateo. Elles sont si intenses qu'on a l'impression de flotter sur un nuage d'étoiles, une grande Voie Lactée.


 

 


Latitude 00

Au bout de quelques jours l'appétit revient, et comme Sylvain pense beaucoup à son ventre, il aimerait bien manger un steak frites: il imagine que l'on pourrait passer commande avec notre téléphone satellite et qu'un hélicoptère viendrait nous livrer à bord, comme le livreur de pizzas sur son scooter. Peut-être un créneau à creuser !!

On prend notre mal en patience, il faut bien, mais on progresse. Un long dernier bord vers le large et le dernier tiers sera couvert sur un seul bord, dans une mer qui se calme et un vent plus régulier.

Le dernier soir donnera lieu à un évènement exceptionnel: le franchissement de la ligne de l'Equateur, et le passage de l'hémisphère Nord à l'hémisphère Sud, que nous ne quitterons plus. Cela a lieu à 23 heures, mais tout l'équipage se réveille pour arroser ça !
Nous ne verrons pas beaucoup le soleil, ni les étoiles, durant cette traversée. Juste quelques heures avant de passer la ligne de l'Equateur, le ciel se dégage momentanément, et nous apercevons pour la première fois la Croix du Sud, une constellation inconnue dans l'hémisphère nord et qui nous accompagnera tout au long de cette deuxième année de voyage.

Et la température baisse régulièrement: partis avec la chaleur moite de Panama, nous ressortons petit à petit pantalons, sweat-shirts, puis polaires et vestes de quart! Les 25° de température moyenne de l'Equateur nous font l'effet d'un automne frisquet chez nous !


 

 


Le port de pêche de Manta

Enfin, la baie de Manta est en vue au petit matin, ou plutôt on la devine dans la grisaille.
On aperçoit une grosse ville, plus importante que ce qu'on croyait. Tout a coup des ailerons apparaissent à quelques dizaines de mètres du bateau: c'est un couple de baleines qui croise notre route et sonde tout près. Nous les identifions comme des rorquals, animaux de presque 20 mètres de long: un beau spectacle pour l'arrivée ! La période juin-septembre est en effet celle de la reproduction et les côtes équatoriennes sont un de leurs lieux favoris.

D'après les indications que nous ont données nos copains de Mallory, qui sont passés par là il y a 4 ans, nous nous faufilons le long de la grande digue au milieu des centaines de bateaux de pêche au mouillage dans le port, des thoniers de toutes tailles, vers le bâtiment du Yacht Club de Manta. Nous pensons y trouver des voiliers en escale mais il y a juste quelques vedettes à moteur, et peu de place pour notre bateau. La plupart des voiliers que l'on a rencontré se dirigeant vers l'Equateur vont à Bahia de Caraquez, un mouillage dans une embouchure de rivière 20 milles plus au nord.
Mais les gens ici sont très accueillants, et après avoir mouillé provisoirement à proximité, les marineros du club déplacent une petite vedette et nous font une place sur une bouée, avec une ancre sur l'avant, où nous serons tranquille pour laisser le bateau.


         


  Panama
(01 juin - 21 juin 2005)


  1 - Panamarina

 

 


Panamarina

 

 

 


En attendant le bus

 

 

 


Jean-Paul achete son cochon

Au lever du jour nous quittons les San Blas pour nous diriger vers l'entrée du Canal de Panama. Mais nous avons prévu de faire une petite halte en route, sur les conseils de nos amis du bateau Mallory, qui sont passés par là il y a quelques années. Un couple de français s'est installé dans le coin et a créé Panamarina, un mouillage en toute tranquillité dans une mangrove près de Cacique.
Très peu de vent encore ce jour-là, nous faisons la route au moteur. La météo se dégrade à mesure que nous approchons et nous terminons sous les grains orageux. L'entrée de Panamarina n'étant pas évidente on contacte par Vhf (canal 69), et Jean-Paul nous répond et nous attend à l'entrée qu'il a lui-même balisée.

Il y a là une trentaine de bateaux alignés entre des bouées, la plupart inhabités car leurs propriétaires les ont laissés pour quelques mois pour rejoindre l'Europe ou voyager sur le continent sud-américain. Nous pensons y retrouver nos copains de Kito, car ils laissent leur bateau ici pendant leur séjour en France de 2 mois. Leur bateau est bien là, mais ayant des problèmes de billet d'avion, ils viennent de quitter la marina il y a quelques heures. Nous qui voulions leur remettre les derniers devoirs du Cned des enfants, c'est raté. Mais il reste une solution, leur porter les devoirs à Panama City où ils sont hébergés dans un hôtel en attendant leur départ. On arrive à les joindre par téléphone et rendez-vous est fixé pour le lendemain.
C'est toute une expédition: de Panamarina, Jean-Paul nous emmène à l'arrêt du bus à 3 km par une piste en terre, puis un premier bus nous emmène à Colon, par des routes peu carrossables au début. Ensuite il faut prendre un bus Expresso pour aller de Colon à Panama City, un dernier bus nous mènera du terminal au centre ville. A l'entrée de Panama City, un gros bouchon nous retarde et nous ratons le rendez-vous. Il nous aura fallu 5 heures pour faire ce trajet d'à peine 100 kms ! Heureusement nous tombons par hasard sur les copains qui sont restés dans le coin et nous leur remettons nos courriers. Le séjour en ville sera court, juste le temps de trouver un cybercafé, car cela fait près de 4 semaines que nous n'avons pas lu notre courrier !

Le retour est un peu plus court et nous rejoignons Panamarina à la nuit, complètement fourbus. Que ne faut-il pas faire pour le Cned! Mais enfin l'année scolaire est terminée et tout le monde pousse un OUF! de soulagement. Les journées seront plus calmes, et on va pouvoir retrouver une plus grande liberté de déplacements.
De plus nous apprenons par un mail le passage en CM2 de Sylvain, il n'y a plus qu'à attendre celui de Florian.

A Panamarina on se sent un peu comme chez soi. Jean-Paul et Sylvie font tout pour nous simplifier la vie, nous dépanner en cas de besoin. Sur place il y a douches, machine à laver, un atelier bien équipé, et ils ont même installé un petit restaurant, où tout le monde peut se retrouver pour discuter, jouer aux fléchettes ou autres jeux de société, lire, boire un verre, et manger bien sur. Un soir nous y mangerons un délicieux plat de poulpe à la coco, et les enfants un poulet au citron non moins excellent. Jean-Paul fait lui-même ses rillettes, avec du cochon local qu'il ira chercher un matin en nous emmenant prendre le bus.


 

 

 


L'église de Portobelo

Nous allons faire un tour à Portobelo, la ville la plus proche: c'est une cité historique, fondée en 1597, et qui a conservé quelques monuments de l'époque de la colonisation. Ce fut le premier et plus important comptoir de la région, par où transitaient les marchandises pour l'Amérique Centrale et la cote Pacifique de l'Amérique du Sud. Elle est défendue par plusieurs forts, car elle fut la cible privilégiée des pirates, comme Morgan en 1668 (le même que celui de l'Ile à Vache), ou Francis Drake, qui y mourut d'ailleurs de la fièvre jaune. Le bâtiment des Douanes, bien restauré, abrite un petit musée qui raconte son histoire.

Le samedi soir, c'est à une soirée pizza que nous nous rendons avec un petit groupe de la marina: une française a installé un petit resto-pizza à quelques kilomètres de là. Nous y faisons connaissance de Gérard et Christine qui se préparent à rentrer à Nice en laissant leur bateau à Panamarina.
Beaucoup de français sont installés dans le coin. Le dimanche, c'est avec Miguel, un basque, que nous faisons une randonnée le long du Rio Guanche. Il connaît bien la région de Portobelo et y organise des randonnées, tout en fabriquant des bijoux à partir de graines de tagua, une curieuse graine très dure qui ressemble à de l'ivoire. Après une pose baignade et pique-nique, nous rentrons trempés par une bonne averse mais contents de cette balade.
Panamarina est entourée de forêts et nous y entendons tous les matins des singes hurleurs, y apercevons des singes à face blanche et même un paresseux, curieux animal qui se déplace tout doucement accroché aux branches par ses grands ongles.


  2 - La traversée du canal


 

 

 


Arrivée à Colon

 

 

 

 


Mateo est paré

 

 

 

 


Entrée dans l'écluse de Gatun

 

 

 

 


Repas après les émotions

 

 

 

 


Le pilote et le skipper

 

 

 

 


un super géant dans le canal

 

 

 

 


Miraflores. Le dernier sas

 

 

 

 


Champagne pour le Pacifique

Mais cela fait presque une semaine que nous sommes là et il faut y aller. La route vers Colon et l'entrée du canal est courte, quelques heures seulement. Nous ancrons avec une dizaine d'autres voiliers au mouillage des Flats, la zone d'attente pour les voiliers. Ce n'est plus la pleine saison pour le passage des voiliers qui a plutôt lieu en février-mars et les délais de passage sont plus courts (5 jours en moyenne au lieu de 2 à 3 semaines parfois !).
Dès le lendemain nous commençons les démarches. Le pied à peine posé sur le ponton du Panama Yacht Club, un chauffeur de taxi nous saute dessus pour nous orienter vers le bureau de l'immigration: heureusement, nous avons appris par d'autres bateaux que c'était un moyen de nous taxer 10 dollars par personne alors que nos formalités d'entrée ont déjà été faites aux San Blas. Il nous propose aussi de nous guider dans les démarches, pour 10 dollars de l'heure, alors qu'ici une course en taxi coûte 1 dollar. Mais le plaisancier est ici aussi la vache à lait, d'autant que certains américains déboursent sans discuter leurs dollars. Quelques instants plus tard, curieusement, c'est l'agent de l'immigration qui vient contrôler nos passeports, en règle heureusement.
Nous faisons tout de suite connaissance avec Henri et Sylvette sur leur trimaran Rayon Vert, un superbe Pulsar 50, bateau de course-croisière très technique, qu'Henry a construit lui-même en deux ans au fin fond de l'Ardèche! Arrivés depuis plusieurs jours ils nous expliquent ce qu'il faut faire ou éviter de faire pour ne pas se faire avoir !
A notre deuxième débarquement au ponton, c'est une agent des Douanes qui nous hèle, et il faut remplir un nouveau formulaire, et fournir quelques photocopies, sans payer heureusement.

La ville de Colon a la réputation d'être peu sûre, et c'est en taxi qu'on fait tous nos déplacements: administratifs, ravitaillement,… Il n'y a que la rue principale, en face du Yacht Club ou nous nous promenons sans risques, de jour uniquement. Certaines rues transversales semblent en effet peu fréquentables. Au mouillage et dans l'enceinte du Yacht Club, il n'y a rien à craindre. La zone de mouillage est éloignée de la ville et on est content d'avoir un moteur d'annexe pour débarquer au ponton du Yacht Club.

Pour les formalités du Canal, la première chose est de se rendre au bureau des agents mesureurs pour demander la visite à bord (auparavant cette démarche pouvait se faire par téléphone, ce n'est plus possible maintenant). L'agent vient dès le lendemain: celui qui vient sur Mateo ne devait pas embarquer souvent car il hésite à enjamber les filières et demande illico que l'on fasse une ouverture pour l'embarquement du pilote! Il prend rapidement les mesures du bateau, vérifie la présence de WC, demande que l'on ait une corne de brume à gaz, et regarde vaguement les amarres, ce qui devrait être le plus important, d'autant que nous n'en avons que 3 réglementaires à bord au lieu de 4. Mais il faut surtout prévoir un bon repas chaud et de l'eau non décapsulée pour le pilote….
Ensuite, rendez-vous est fixé au bar du Yacht Club pour une heure de remplissage de papiers et de recommandations diverses, pendant que monsieur mange son sandwich-Coca! A la question fatidique "marchez-vous à 8 nœuds" il faut répondre "oui" sous peine de se faire taxer un supplément. Curieusement, un chauffeur de taxi est déjà la pour nous proposer une corne de brume, à 22 dollars !

Le lendemain, nouvelle démarche, à la City Bank cette fois, pour régler le passage de 600 dollars et la caution de 850 dollars. Là encore ce n'est pas simple: la carte Visa seule est acceptée, mais pour un retrait de cash et non comme paiement, et du fait de la limite de retrait de la Visa, on ne peut pas payer avec! Après avoir contacté notre conseiller bancaire en France sans trouver de solution, il nous faut donc aller dans une autre banque faire des retraits avec nos deux cartes, la Visa et une Mastercard, puis compléter avec des travellers chèques pour réussir à réunir enfin la somme. Rien n'est fait ici pour simplifier la vie des plaisanciers qui veulent passer le Canal, on dirait même que c'est le contraire. Il faut dire que les cargos qui transitent par cinquantaine chaque jour sont meilleurs clients que nous !
Dès que le règlement est effectué, nous téléphonons pour connaître la date de notre passage qui sera fixé 48 heures plus tard.
Dans le même temps, nous cherchons des équipiers pour nous aider car il faut être 5 à bord en plus du pilote: le barreur et 4 "handliners", les teneurs d'amarres. Après avoir espéré la participation de Gérard et Christine, qui finalement se désistent, il nous faut trouver du monde rapidement. On commence à s'inquiéter, car le temps presse, mais en parlant autour de nous, nous trouvons en quelques heures plus de monde qu'il nous faut. Ray et Burny, des américains d'Alaska, viennent d'arriver sur leur bateau Whisper et cherchent un embarquement; nous les connaissons déjà pour les avoir rencontrés à Coco Bandero aux San Blas. Un équipage néo-zélandais cherche aussi un passage pour se faire la main et deux des équipiers, Peter et Will, viendront nous prêter main forte.
Pendant ce temps, Joëlle s'est embauchée sur Rayon Vert, dont un des handliners, un russe embauché sur le quai pour 30 dollars vient de les lâcher. Cela lui permettra de voir le passage et de moins stresser sur Mateo ensuite. Mais cela ne commence pas bien sur le trimaran: au prétexte qu'Henry (le skipper) ne parle ni espagnol ni anglais, le pilote refusera, dans un premier temps, de faire passer le trimaran (dans ce cas, la caution de 850 dollars saute !). Joëlle ira ensuite calmer Henry qui engueule le pilote parce qu'il lui a interdit de fumer sur son propre bateau. Finalement, après plusieurs heures d'attente, Rayon Vert s'engagera dans l'entrée du canal. Mais la tension est au summum sur Rayon Vert ! Heureusement, le lendemain, la deuxième partie du passage se passera beaucoup mieux.
Nous, nous passons une soirée "entre hommes" à bord de Mateo. Joëlle rentrera juste à temps le dimanche matin, totalement crevée, et nous racontera sa traversée.

Mais aucun passage n'est identique et l'expérience des uns n'est pas forcément celle des autres.
Enfin c'est notre tour. Le rendez-vous est fixé pour le dimanche soir. Il nous faut, juste avant, retourner faire les papiers de sortie, quelques heures pour 3 bureaux et 10 dollars supplémentaire… Mais il vaut mieux semble-t-il les faire ici qu'à la sortie du Canal où le coût est de 24 dollars !
Le dimanche matin, un coup de fil nous fixe le rendez-vous avec le pilote à 16h30. Nous espérons ne pas avoir à tourner en rond pendant 4 heures comme Rayon Vert, mais ce n'est qu'à 18h40 que le pilote monte à bord.
Il n'est pas des plus charmants, et dès son arrivée nous demande de partir à fond pour passer les écluses avec un bateau militaire qui attendait à coté de nous. Il commence à faire nuit, et il faut se dépêcher car nous passons en même temps qu'un cargo qui est déjà dans l'écluse, un autre suivant de près. Les moteurs de Mateo n'ont pas l'habitude d'un tel régime et se mettent à chauffer. En ouvrant les trappes des soutes cela va mieux, mais le moteur bâbord refuse de redémarrer, ce qui fait que nous entrons dans l'écluse avec un seul moteur. Mateo arrive à marcher ainsi mais lorsqu'il faut manœuvrer c'est plus problématique.

La première écluse montante se passe bien. On est amarré au bateau militaire qui lui est le long du mur et doit donc seul régler les amarres. Le cargo devant nous fait un gros remous lorsque les portes s'ouvrent mais nous sommes encore amarrés au bateau militaire. A la deuxième écluse même chose: on revient se mettre le long du bateau militaire et on monte sans problème: près de 9 m de dénivelé là aussi. Mais au moment de repartir, le pilote nous fait larguer un peu tôt, un petit coup de marche arrière met Mateo en travers, et avec les remous provoqués par le cargo et le bateau militaire, il devient incontrôlable et part en crabe. Impossible de le redresser avec un seul moteur, et nous venons heurter violemment la porte de l'écluse. Il faudra tendre une amarre sur le quai pour nous redresser et repartir vers la dernière écluse montante. Celle-ci se passe mieux, et le pilote nous dirige vers une bouée où nous passons la nuit. Il est pressé de quitter le bateau, et notre mésaventure l'a plutôt fait sourire: dans les écluses il préférait d'ailleurs la compagnie des militaires du bateau voisin que la notre …
A peine est-il parti qu'un gros orage éclate. Le bateau est bien arrosé pour cette première étape! Tout l'équipage se réunit pour se détendre autour d'un bon repas: des toasts de pâté préparés par les enfants, puis un poulet au coco arrosé d'un petit Bordeaux et pour finir un cake aux raisins. Les équipiers anglophones apprécient ce repas français! Une petite séance de mécanique permet de remettre le moteur en ordre de marche pour le lendemain, ce n'était qu'un mauvais contact électrique. Ce sera une courte nuit car il faut être prêt à 6 h le lendemain pour accueillir le pilote du deuxième jour.

Changement d'ambiance pour la suite heureusement: Gimmy est plus cool, c'est un asiatique et il passera une partie de la traversée du lac de Gatún à sommeiller dans le cockpit, en se réveillant juste aux moments où il faut changer de chenal. Après 5 heures de route, et après avoir traversé le Gaillard Cut, un endroit étroit où on croise de jolis monstres de près, nous arrivons sous le nouveau pont Centenario, en vue de l'écluse descendante de Pedro Miguel. Comme il n'y a pas de cargo prêt à passer, nous serons seuls dans le sas. C'est royal, pas de remous, on est juste amarrés le long du mur par 2 amarres qu'on lâche doucement. On se croirait à l'écluse d'Arzal, en plus grand évidemment! 100 000 m3 d'eau lâchés rien que pour nous et une descente tranquille de 9 mètres.
Un petit SMS envoyé au webmaster le prévient que l'on arrive aux derniers sas, car il y a une webcam qui permet de voir les bateaux passer. Le pilote envoie même un petit coup de Vhf pour que l'opérateur oriente la caméra sur nous: la famille nous verra donc en direct sur Internet !
Les 2 dernières écluses, celles de Miraflorès, se passent aussi simplement que la précédente, et c'est avec émotion que nous voyons s'ouvrir la dernière porte, celle qui permet aux coques de Mateo de goûter à l'eau du Pacifique pour la première fois. Le champagne était au frigo depuis un moment et tout l'équipage trinque pour l'occasion, pilote compris.

Quelques miles plus loin, nous débarquons les équipiers au ponton du Balboa Yacht Club, puis un bateau vient récupérer le pilote alors que nous nous dirigeons vers le mouillage derrière l'île de Flamenco où nous attendent les copains de Rayon Vert, et ceux de Ummagumma, un jeune couple suisse.

Ci-dessous, les images de la webcam du canal, enregistrées en direct le jour du passage de Mateo

















  3 - Panama City

 

 

 

 


Le pont des Amériques

 

 

 

 

 

 

 

 


Panama City est en vue


Ce mouillage se situe dans la baie de Panama City, la capitale du pays: rien à voir avec Colon, ici c'est une ville à l'américaine et des dizaines de gratte-ciels s'alignent à l'horizon. Et surtout, on s'y promène en sécurité.
Pour aller en ville on prend un petit bus jaune, qui nous emmène directement la Plaza Cinco de Mayo, en plein centre-ville. Dans la rue piétonne, s'alignent les magasins de matériel d'électronique, de vêtements,… On en profite pour remplacer notre matériel défaillant: lecteur CD, magnéto K7.
On trouve de tout ici, les supermarchés sont 3 fois plus grands que chez nous et proposent toutes sortes de choses: le El Machetaso, où nous allons, s'étale sur 6 niveaux allant de l'alimentaire, la papeterie, la vaisselle, le sport, les jouets, la pharmacie, l'électronique et audio-vidéo et une cafétéria au dernier étage. On y passera une partie de la journée et on rentre avec un plein coffre de taxi, puis on recommencera le lendemain. Les prix sont vraiment intéressants, de 30 à 50% moins cher que chez nous.

En revenant de faire les courses, une grosse surprise nous attend: Mateo s'est déplacé de plusieurs centaines de mètres et se trouve pas loin de la digue rocheuse ! Pendant notre absence, il y a eu un orage et de fortes rafales ont fait déraper l'ancre sur le fond de vase molle. Heureusement, Caroline de Ummagumma, restée à bord de son bateau, est intervenue avec deux autres personnes et ils ont réussi à jeter une deuxième ancre pour le stopper. Un gros merci à tout le monde, et beaucoup de chance pour nous.

Joëlle accuse le coup de la fatigue et de l'angoisse de ses deux passages, et elle se décore d'un bel herpès à la lèvre pendant quelques jours.

Pendant notre séjour à Panama City, nous allons visiter le Musée du Canal: très instructif; il raconte l'historique de la construction, la vie de l'époque, l'évolution politique jusqu'à la prise en charge du canal par les Panaméens …
Dès la colonisation espagnole, une route entre les deux mers est envisagée et la ville de Panama naît sur la cote Pacifique en 1514. Ce sera d'abord le Chemin Royal qui la relie à Portobelo et permet de transporter les richesses de l'Amérique du Sud, or et métaux précieux, vers l'Atlantique et l'Europe. Puis on découvre le fleuve Chagrès qui se révèle navigable depuis son embouchure sur l'Atlantique jusqu'à une trentaine de kilomètres de Panama. Différents pays, la France, l'Espagne, l'Angleterre, les Etats-Unis, la Colombie, explorent alors la possibilité de creuser un canal pour prolonger cette voie naturelle.
En 1852, la Colombie accorde aux Etats-Unis une concession pour réaliser un chemin de fer transisthmique. Mais il faut attendre 1869 et le succès de la réalisation du Canal de Suez pour que soit décidée la construction d'un canal sous la responsabilité de Ferdinand de Lesseps.
Il avait été décidé que le canal serait à niveau c'est-à-dire sans écluse, mais cette solution s'avéra vite irréalisable. Les conditions climatiques provoquaient éboulements, maladies qui retardaient le travail et qui provoquèrent la mort de dizaines de milliers de travailleurs.
Ceci provoqua la faillite de la Compagnie du Canal Transocéanique et la ruine de milliers d'actionnaires.
Les Etats-Unis, après des pressions politiques et économiques sur la Colombie dont il faisait partie précipitent l'indépendance du Panama, puis reprennent la concession de la construction et de la gestion du canal. Avec des mesures sanitaires importantes, en particulier dans la lutte contre les moustiques, des moyens techniques énormes, ils creusent le lac Gatún et réalisent les jeux d'écluses qui équipent le canal actuel. Le 15 août 1914, un premier navire à vapeur peut emprunter le Canal de Panama. Les Etats-Unis gèrent et occupent alors la zone du Canal et une partie de la ville de Panama City, aux termes d'une Convention de 90 ans.

Mais le Panama revendique avec de plus en plus de force la propriété du canal, jusqu'aux manifestations sanglantes de 1964, et un traité est signé en 1977 pour rétrocéder le Canal aux Panaméens au 31 décembre 1999.
L'enjeu économique est énorme, quand on sait que près de 20 000 bateaux transitent chaque année et qu'un paquebot peut payer jusqu'à 150 000 dollars pour le passage. Lorsqu'on voit le niveau de vie d'une partie de la population panaméenne, on se demande parfois où passe tout cet argent !
Un après-midi, nous allons faire quelques photocopies de cartes marines à Balboa, dans l'ancienne zone du canal: ici sont installées les administrations du Canal, ainsi que les logements des employés. Grandes allées à l'américaine, pavillons et pelouses, le contraste est étonnant avec le reste du pays.

Avant de relever l'ancre, il y a encore quelques petits travaux à faire sur Mateo: reboucher à la résine les petits "bobos du canal" sur l'étrave, recoller une barre qui se fendille. Pas facile de trouver un moment pour faire cela, car le climat est lourd et humide, les orages fréquents et il pleut presque tous les jours. La moisissure commence même à s'installer à bord !
Après avoir fait le plein de gazole à la toute récente marina de Flamenco, on n'est pas mécontents de quitter le Panama et de faire route vers le sud, direction l'Equateur.


              


  Les Iles San-Blas

(14 mai - 01 juin 2005)

 

 

 


Arrivée aux San-Blas

Nous quittons l'Ile à Vache pour notre plus longue traversée depuis longtemps, 600 milles, soit près du tiers de la traversée de l'Atlantique. D'ailleurs la météo nous rappellera celle de la transat ! Des grains, des orages, puis 24 heures de calme plat pour finir. Mai est le début de la saison des pluies dans les Caraïbes et ce type de temps est fréquent dans le coin. Nous traversons donc du nord au sud la mer des Caraïbes pour rejoindre la cote du Panama, plus particulièrement l'archipel des San Blas un peu à l'est du canal.

Au bout de 5 jours nous arrivons en vue des îles, que l'on ne voit qu'au dernier moment tant elles sont basses sur l'eau. Seules les rangées de cocotiers dépassent pour nous avertir de l'arrivée. Il faut naviguer prudemment ici, les récifs sont nombreux, et les cartes plus ou moins précises. On s'arrange donc pour naviguer autour de midi, là où le soleil est haut et où on voit bien les différences de couleur de l'eau: si c'est foncé c'est profond, si c'est bleu turquoise, c'est du sable, si c'est brun, attention au corail !
Arrivant un samedi, nous rentrons dans le premier mouillage où l'on aperçoit 5 ou 6 bateaux, et on attendra lundi avant d'aller faire les papiers d'entrée (en fait, les bureaux étaient ouverts tous les jours!): un petit lagon bien protégé par des îlots et un grand récif.
A peine l'ancre posée on se fait quasiment insulter par un français qui trouve qu'on est trop près de lui! Il y a des imbéciles même au bout du monde! On rencontre d'autres français bien plus sympas, Florence et Laurent et leur fils de 2 ans Keran, qui n'a jamais connu la vie à terre, sur leur cata Kito. Ils sont dans le coin depuis plusieurs mois et nous donnent plein de conseils.


 

 


Limon Cays

 

 

 


Le puit de Limon Cays


Le dimanche matin, on va chez le boulanger: installé avec sa famille sur un îlot minuscule, il fait des petits pains délicieux, dans un vieux fut de 200l chauffé aux branches de cocotiers !
Lundi nous allons donc faire les formalités à Porvenir, où se situent les bureaux de l'immigration et de la douane. Encore une fois il faut débourser plus de 100 dollars, en comptant le permis de navigation dans les eaux de Panama! Il y a même un petit aéroport sur cette île minuscule. Mais le mouillage n'est pas abrité et nous partons ensuite directement à Limon Cays, à peine 3 milles à l'est. On zigzague à vue entre les récifs, parfois dans quelques mètres d'eau, Joelle et Sylvain surveillent à l'avant la couleur de l'eau pendant que Florian regarde la carte sur l'ordinateur, et on trouve un mouillage désert entre 4 îlots.

Pendant que l'on se prépare à manger le repas de midi, on aperçoit sur la plage proche une vieille femme kuna en train de descendre de sa pirogue une cinquantaine de bidons en plastique: il y a un puits sur cet îlot et elle vient d'un ilot voisin faire sa réserve. Nous débarquons tous les 4 pour lui donner un coup de main. Le puits est un simple fût en plastique enfoncé dans le sable et il faut se pencher pour remplir les bidons, de tous les types, depuis le bidon de 30 l jusqu'au petit bidon à huile de 2 l ! Après qu'on l'ait aidé à charger sa pirogue, elle repart tranquillement à la rame. Peu de paroles échangées, elle ne parle que le kuna, juste un petit sourire: le mot merci ne fait pas partie du langage courant ici, il est normal de se rendre service, de partager si le voisin n'a pas grand-chose à manger, ça fait partie des choses naturelles. On voit bien que nos repères occidentaux n'ont plus court ici !

Mardi 17, temps à grains. La balade prévue dans la mangrove et sur l'îlot proche du bateau a été écourtée. On a juste été planter les deux cocotiers qui agrémentaient le cockpit de Mateo depuis la Dominique et avaient besoin de terre ferme. Pendant les grains, on s'active à bord pour récupérer le maximum d'eau dans des seaux, bassines, bidons, en utilisant le roof et le taud de cockpit comme récupérateurs: on a vite fait de récupérer 100 litres d'un coup! Une aubaine car ici les points d'eau sont rares.
C'est aussi un temps à faire de la cuisine: on cuit les deux énormes crabes-araignées et les 7 petites langoustes que des pêcheurs nous avaient vendus le matin pour 5 dollars (environ 4 euros). A ce prix là on en mangerait tous les jours !



 

 


Nuinudup

 

 


Les molas de Rosalia

Depuis qu'on est arrivé, le vent est orienté au sud-ouest, ce qui arrive en cette saison des pluies, mais dure un peu trop cette année. Dans ces conditions il n'est pas facile de trouver un mouillage abrité, car la plupart sont protégé des vents de nord-est plus fréquents ici.
Le 18 nous avons fait 3 mouillages avant de trouver le bon: un petit tour devant le village de Soledad, pour voir que le mouillage est très venté, un essai à Los Grupos, mais l'endroit qu'on a trouvé pour poser l'ancre est constitué de corail et l'ancre n'accroche pas. On termine à Nuinudup, un endroit où il y a déjà du monde. Pas complètement abrité, mais il y a du sable et l'ancre croche bien.
Le lendemain matin, Laurent de Kito m'invite à aller chasser avec lui et un autre français. Nous partons en annexe, et mouillons au bord du récif. Le long du tombant on voit passer des barracudas mais aucun ne s'approche assez près pour être tiré. Nous changeons de coin, un endroit ou il y a des carangues que je rate de peu. Je rentre bredouille, mais Laurent partage avec nous un gros barracuda qu'il a attrapé, et que nous mangerons le soir avec un beurre blanc en sachet, ma foi bien convenable.

A Niunudup, nous faisons la connaissance de Rosalia et Reinaldo. Ils sont sur l'île depuis 3 mois et repartent dans quelques jours dans leur village d'origine pour être remplacés par une autre famille. Nous visitons leur campement et passons un moment à discuter, à regarder les molas de Rosalia, et à troquer quelques vêtements d'enfants et un masque de plongée contre des bracelets et des molas.
Les molas sont de véritables œuvres d'arts réalisées par les femmes à longueur de journée: du temps de la colonisation espagnole, il fut interdit aux kunas de se tatouer le corps, les molas ont remplacé les tatouages sur les vêtements traditionnels féminins. Constitués de plusieurs couches de tissus de différentes couleurs, ajourés et cousus, leurs motifs sont très variés: animaux, scènes de vie, motifs abstraits, scènes religieuses, ce sont pour les plus beaux des œuvres qui demandent parfois plusieurs mois de travail.


 

 


Coucher de soleil à Miriadadup

 

 

 


Perchoirs aux pélicans

Nous changeons d'île pour aller mouiller devant Miriadiadup, à l'ouest de Cayo Hollandes. Une famille vit sur cette île, et nous allons la saluer à notre arrivée. Ils sont six, de 3 générations à vivre ici pendant 6 mois, puis une autre famille les remplace ensuite. Leurs activités consistent à ramasser les cocos, qui seront vendues à des grossistes colombiens, pêcher et entretenir l'ile. Après les présentations et quelques échanges, on a droit à voir la production de molas, et on fait un petit achat.
Les enfants présents sur les îlots du large sont presque toujours les filles, les garçons restant au village pour étudier.
La majorité des Kunas vit dans des villages construits sur les îles les plus proches du continent. Ces îles sont tellement peuplées qu'il faut en général remblayer une partie du récif pour agrandir le village. Chaque village possède une partie des îlots du large sur lesquels certaines familles vont pour exploiter les noix de cocos, pratiquer la pêche… pendant quelques mois avant de revenir dans leur village et laisser la place à une autre famille. Le territoire kuna comprend aussi une partie continentale, sur laquelle sont faites les cultures de fruits et légumes, et où ils se ravitaillent en eau pendant la saison sèche. Cette bande côtière est convoitée pour l'exploitation forestière et la construction d'une route mais pour l'instant les Kunas ont réussi à la préserver. Chaque village est géré par un conseil des anciens, le congresso, qui se réunit plusieurs fois par semaine pour discuter et prendre les décisions nécessaires à la gestion du village. Le chef, le sahila, est très respecté. Mais les jeunes s'habillent de plus en plus à l'américaine, vont faire des études à Panama City, la capitale, et fréquentent de moins en moins le congresso. La civilisation kuna est-elle en train de perdre ses racines ?

C'est la saison des pluies et le climat n'est pas toujours agréable: la nuit dernière, il n'y avait pas un souffle d'air, c'était difficile de dormir et les "chitras" ces moustiques minuscules, en profitaient pour attaquer! La nuit suivante nous avons eu un gros orage: le bateau vibrait sous certains coups de tonnerre, le ciel était couvert d'éclairs, avec averses et rafales de vent. Par précaution, on a enroulé quelques mètres de chaîne autour d'un hauban pour le relier à la mer, et on surveillait sur l'écran pour voir si le bateau ne dérapait pas: merci à la précision du Gps et à l'électronique.

Des pélicans peuplent souvent les îlots. C'est étonnant un pélican: on les voit planer puis plonger lourdement pour attraper leur repas, parfois ils se laissent flotter en groupe, parfois ils sont posés alignés sur un tronc couché de cocotier. Le plus rigolo, c'est lorsqu'ils sont perchés tout en haut des cocotiers, ailes étendues, pour se faire sécher !


 

 


Bonne pêche

Nous quittons Cayo Hollandes pour Coco Bandero, un autre récif plus au sud-est. Le cadre est idyllique: mouillés entre 3 îlots dans une eau turquoise, on se croirait sur une carte postale. Une petite dizaine de bateaux sont ancrés ici, certains depuis pas mal de temps. Il faut dire que la vie est simple ici: un peu de chasse sous-marine sur le récif pour se nourrir, de temps en temps une pirogue passe pour vendre fruits, légumes, pain, lait, bière, … et des pécheurs proposent régulièrement langoustes ou poissons pour quelques dollars.
En allant faire un tour sur le récif un matin, je réussis à attraper une langouste, cachée sous un vieux tronc d'arbre! Mais c'est plus pour le plaisir, car pourquoi se fatiguer quand pour 1 dollar on a du poisson pour nous 4, en ayant en plus fait travailler un pêcheur.

Sur la plage à une vingtaine de mètres de Mateo, les gens de certains voiliers ont aménagé un petit coin avec des matériaux de récupération et des bois flottés: un filet de volley, un barbecue et un coin pique nique, agrémenté de quelques sculptures abstraites. Nous passons une partie de l'après-midi à jouer avec les enfants au badminton, au diabolo et le soir nous nous retrouvons avec les autres bateaux, des allemands, autrichiens, un suisse d'origine basque…pour faire ensemble une partie de volley, boire un coup et discuter. Nous faisons la connaissance de Roman, un allemand qui a construit son catamaran comme nous, un Pahi 42 de l'architecte Wharram, inspiré des pirogues polynésiennes. Il est ici depuis 3 ans et sillonne les San Blas et la cote du Panama. Il connaît bien le coin et nous donne quelques tuyaux.

 

 


Le village de Nargana

 

 


Provision d'eau sur le Rio

Nous quittons Coco Bandero pour aller à Nargana. C'est un village situé près du continent, le plus gros des San Blas, un peu la capitale de la région. On y trouve un aéroport, un hôtel, un restaurant, quelques boutiques, un hôpital, une école primaire et secondaire, et même la police et la prison. En fait il y a un deuxième village, Corazon de Jesus, relié à Nargana par un pont. On y voit beaucoup d'enfants qui nous font de grands gestes en disant "Hola". Malgré le peu de place disponible, on remarque des terrains de foot, de volley, de hand qui sont bien utilisés.
L'architecture est un peu hétéroclite, des constructions en parpaings côtoient des huttes en cocotier. Mais même dans les huttes en cocotier on trouve la télévision qui marche à longueur de journée, car le village possède un groupe électrogène: l'antenne est plantée sur un grand bambou! On commence même à voir quelques paraboles. Il parait que la dernière mode des jeunes kunas est s'échanger les DivX qu'ils récupèrent en ville!! Frederico nous aborde dans le village, car il aime le contact avec les voiliers de passage et propose ses services si besoin. Il nous emmène chez lui où nous faisons connaissance avec sa famille, dont un enfant de 7 ans, paralysé des jambes par accident depuis l'age de 2 ans.

Nous remontons en annexe le Rio Diablo, une rivière qui débouche juste en face de Nargana, jusqu'à un endroit où le fleuve se resserre: une pancarte indique qu'il faut couper les moteurs car c'est ici que les kunas viennent faire leur provision d'eau.
Nous en profitons pour remplir nos bidons, car l'eau est très claire. Nous mettons pied à terre pour voir les plantations sur la rive. Il y a même un petit cimetière, car les kunas enterrent leurs morts sur le bord des rivières. Comme le fait remarquer justement Florian, c'est la première fois depuis le Portugal, il y a presque 7 mois, que nous mettons les pieds sur un continent! Il y a un petit restaurant à Nargana: pour quelques dollars nous mangeons un poisson ou un poulet grillé avec des bananes plantains qui, bien arrangées, ont presque le goût de nos frites !

Nous laissons Nargana, où il y a vraiment trop de moustiques, pour un mouillage désert sur Green Island. Il parait qu'ici vit un crocodile, et dès qu'on entends un bruit suspect on s'attend à le voir apparaître, mais sans succès. Sur la cote nord de cet île, c'est un amoncellement de bois flottés de toutes sortes et de toutes formes: un véritable musée d'art abstrait !

 

 

 


Jose-Luis et ses nonis

Après Green Island, nous revenons à Niunudup, où nous pensons revoir nos copains de Kito, mais ils sont repartis la veille.
Nous visitons l'îlot voisin, où Jose-Luis et sa famille vivent depuis 4 ans. Ils ont défriché l'île et planté bananiers et arbres à "nonis", des petits fruits qui servent de médicament. Comme d'autres, Jose-Luis récupère les canettes en aluminium, qui seront revendues pour gagner quelques cents. Sur la plage, on voit une raie qui passe à 1 mètre du bord! Pendant que l'on discute un nouveau voilier arrive au mouillage: Jose-Luis sonne avec sa corne en lambi, un gros coquillage, pour avertir les familles des îlots voisins, et tout le monde embarque pour essayer d'aller vendre quelques molas au nouvel arrivant.
On en profite pour faire un petit nettoyage de coque qui a encore attrapé quelques algues: mais quelques jours plus tard, c'est un otite qui atteint le capitaine…. Il n'y a pas que des bébêtes sympathiques sur une coque.
En remontant le mouillage le lendemain, une surprise nous attends: un tronc d'arbre est enroulé autour de la chaîne, et il nous faudra un moment pour le retirer. Heureusement à force d'efforts il se casse ce qui nous facilite la tache.

Notre dernière escale sera pour Chichime, qui fut notre point d'arrivée deux semaines et demi plus tôt. Les même pirogues viennent nous voir, mais, nous reconnaissant n'insistent pas. Nous faisons un dernier échange de vêtements d'enfants contre quelques molas. Nous faisons connaissance avec Nicolas qui vient nous emprunter une paire de palmes. Ce jeune français est en vadrouille sur le continent sud-américain depuis plusieurs mois et a trouvé un bateau norvégien pour aller de Colombie au Panama car les communications terrestres sont inexistantes. Il travaille dans l'environnement et connaît bien Ifremer pour y voir fait un stage: le monde est petit!

              


    

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